VALSE AVEC MON CINEMA

THE WE AND THE I de Michel Gondry

 

2012 - USA/GB - Durée: 1h45

Distribution: Teresa Lynn, Lady Chen Carasco, Michael Brodie, Raymond Delgado, Jonathan Ortiz, Meghan Murphy, Jonathan Scott Worrell, Alex Barrios, Elijah Canada, Kendrick Martinez...

 

 

 

                                                The We and The I : affiche

 

 

L'ouverture de The We and the I promet des merveilles avec l'entrée vitaminée d'un bus miniature présenté sous les traits d'un ghetto blaster -gros poste de radio à l'américaine, accessoire préféré de la jeunesse hip-hoppeuse des années 70/80- sur une autoroute bondée. Energiquement accompagné par le groupe de rap Run DMC et la chanson ''It's like that'' (traduisez ''C'est comme ça''), le jouet pourrait représenter le ''the I'' (le ''Je'') du titre. Quelques secondes plus tard, avec autant de dynamisme, un vrai bus scolaire entre dans le cadre pour finalement écraser la petite machine et là nous comprenons rapidement que la voici la vraie star du film, celle qui pourrait représenter le ''the we'' du même titre. Tout est dit, tout est déjà là.

 

 

Nous sommes aux Etats-Unis, plus particulièrement dans le Bronx, Etat  de New York à la mauvaise réputation mais qui représente plus qu'aucun autre ''borough'' toute la dimension urbaine, métissée et populaire de la Big Apple. Sommes-nous devant un film de Spike Lee, grand représentant du cinéma urbain et du mouvement hiphop des années 90? Eh bien il semblerait que non, car nous ne sommes pas à Brooklyn, autre état new-yorkais cher au cinéaste africain-américain depuis ses débuts filmographiques. Ici, celui qui nous emmène flirter avec une bande d'adolescents turbulents durant un itinéraire lycée-domicile, c'est le frenchy Michel Gondry, accessoirement ami avec Spike Lee.

 

 

Michel Gondry, un cinéaste français insaisissable et un artiste inspiré émigré aux Etats-Unis depuis une dizaine d'années. Propulsé dans une aventure créative audiovisuelle grâce à ses prouesses clippesques (Bjork: Bachelorette, Daft Punk: Around the world, White Stripes: Fell in love with a girl, Massive Attack: Protection...), Michel Gondry est également l'auteur tantôt poétique, tantôt comique des films ''Eternal Sunshine of the spotless mind '', ''Soyez sympas, rembobinez! '' ou encore ''Human Nature'' et le plus récent ''The Green Hornet''...Autant de films que de façons de voir le monde.

 

                                                      

 

 

 

C'est donc à travers un regard original et peu commun que nous prenons place dans un de ces bus qui desservent quotidiennement la banlieue du Bronx. Après avoir été sauvés par un gong qui marque la fin de l'année scolaire et le début des vacances estivales, nous quittons une salle de cours avec de jeunes lycéens pour se jeter dans les rues avoisinantes. Timides au premier abord, une fois embarqués dans l'autocar en folie, nous découvrons les différentes personnalités qui vont servir à  nous plonger au coeur de l'adolescence pas du tout dorée de ces jeunes américains. The We and The I est un titre très significatif qui pourrait être celui d'un livre de sociologie lambda mais qui est celui d'un film en plusieurs actes. Cinq si je m'en souviens bien. Cinq actes à travers lesquels on redécouvre que le groupe social est d'une importance capitale dans un monde où la (sur)-communication semble être la condition sine qua non pour un développement et un épanouissement personnel total. Mais les comportements et les positions occupées dans un groupe sont-ils ceux que nous adoptons confortablement dans nos vies intimes, individuelles? Voilà la question que nous pose le film. Pouvons nous ''être'' avec les autres ce que nous sommes sans les autres? Disons nous les mêmes choses de nous, nous exprimons-nous de la même manière? 

 

 

Un bus, une trentaine d'adolescents, de franches rigolades, quelques provocations et une tension palpable, voici les divers éléments que le cinéaste utilise afin de comprendre ce qui fait le Nous et ce qui trahit souvent le Je. Les jeux du Je. Blagues bon enfant, mélodrames amoureux, moqueries, dragues et autres tranches de vie quotidienne nous amènent sur une pente qui m'a très vite l'air glissante mais surtout fragile. Celle qui nous fait passer des rapports superficiels aux vraies émotions.

 

 

Dans ce huis clos (espace fermé, bien défini, action se déroulant dans un cadre unique) ponctué de quelques échappées belles en extérieur, souvenirs d'un passé récent, les sales gosses exhubérants se moovent, gesticulent, se toisent, se chamaillent, perdent la face, à la limite du rixe et parfois du désespoir. Ceux qui ont passés l'âge des appareils dentaires et qui ont (enfin!) perdus leur virginité s'y reconnaitront en nostalgiques compulsifs. Pour les autres, il sera sûrement plus sage de prendre du recul et de rester un peu en dehors de cette période pas facile-pas facile qu'est l'adolescence. L'époque n'étant plus tout à fait ce qu'elle était, les questionnements relatifs à ce difficile passage restent eux en suspens.

 

 

Pour ma part, le début de l'aventure m'a beaucoup amusée - bien que malade - parce que j'adore ces films, parfois puériles, qui relatent les états d'âme de teenagers, pas tout à fait dans l'âge adulte et qui pourtant s'en approchent à grande vitesse. Parce qu'à 17 ans, c'est chiant d'avoir 17 ans et qu'à 30 printemps, c'est tout aussi chiant et qu'on aimerait parfois retrouver ces moments précieux où ne comptent que les copains et la découverte de tous nos sens. Ou pas. Mais une fois le deuxième acte terminé, une fois les présentations faites, j'ai commencé à ressentir une sorte de claustrophobie, de malaise, avec une envie assez pressante de sortir de ce bus où le mal être était proche, enseveli par un scénario très très bavard. Où les mots cachent les maux et le silence n'est sûrement pas d'or. Avec en bonus, une vision très juste sur le phénomène dévastateur du portable et des mms (ou du clip, univers que connaît bien Gondry), moyen de comm' très en vogue pour faire partager au plus grand nombre la vie trépidante de chacun...

 

 

Classé comédie dramatique, The We and The I réserve dans son dernier acte une triste surprise. Parce que la vie est ainsi, elle est surprenante de bons et moins bons moments. Moments qui nous poussent très souvent à nous montrer tels que nous sommes. Réellement. Sympas...ou pas, vulnérables...ou pas, sombres... ou pas, seuls....ou pas. C'est sans doute à cet endroit précis que le Je a encore plus besoin du Nous. Parce que le nombre noie parfois l'essentiel et que l'essentiel c'est justement l'essence du Je.

 

 

Mais si vous voulez passer un bon moment et plus si affinités, soyez sympas, montez dans ce bus...

 



20/09/2012
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