VALSE AVEC MON CINEMA

ALL OR NOTHING de MIKE LEIGH (2002)

Comédie dramatique - Grande-Bretagne - Durée: 127 minutes

Distribution: Timothy Spall, Lesley Manville, Alison Garland, James Corden, Ruth Sheen, Marion Bailey, Sally Hawkins, Helen Corker...

 

 

Le temps me manque cruellement...Et le cinéma continue à dévoiler généreusement ses beaux tissus que Mike Leigh, un de ses plus fidèles drapiers, nous invite à dérouler et admirer avec attention. Pièces dans le fond d'un grenier mal éclairé, que l'on n'aurait pas vu. Pièces qui, d'apparence, ne semblent être ni de velours ni d'organza mais plutôt de ces étoffes, un peu rigides, et dans lesquelles on tenterait de se sentir bien sans vraiment y parvenir. 

 

All or Nothing sans être du poil à gratter est une oeuvre qui irrite la peau mais dans le seul but de faire ressortir ce grain si fin et si fragile cachée en dessous...bien en-dessous.

  

Mike Leigh, réalisateur britannique considéré depuis la sortie de Naked (1993) - qui marquera son grand retour au cinéma - comme un des meilleurs avocats à la barre de la classe ouvrière anglaise plaide ici la légitime défense. Démontrant avec grande habileté que les vrais gens ont d'abord pour principal projet de s'en sortir et de joindre les deux bouts avant de se réjouir des festivités à l'approche du jubilé royal.

 

A l'aide d'une plume acérée et d'une encre qui tâche, l'électron libre qu'est Leigh laisse des traces sur le papier et la spectatrice que je suis tente de se souvenir ce qu'elle a vu d'écrit...

 

TOPO:

 

Phil et Penny sont pris entre routine et déprime coincés dans leur boulot respectif et happés par leur train-train quotidien.

 

Lui est chauffeur de taxi employé au rabais dans une petite société, elle est caissière dans un supermarché des environs. Pendant que leur fils Rory, plombé par une obésité envahissante et par une trop grande allergie au travail reste à égale distance de la télé et du canapé familial, Rachel, leur fille, fait des ménages dans une maison de retraite. 

   

 

Entre ses heures interminables à transporter des personnages plus fêlés que dangereux et à attendre les fades dîners familiaux, Phil, dont la bonhomie et la grande nonchalance pourront toucher comme irriter, fait les fonds de tiroir pour payer la location de sa voiture de fonction.

 

 

 

De son côté, Penny, irritée par une vie sans feux d'artifices, par l'agressivité grandissante de son fils et par l'absence d'autorité de son compagnon tente de trouver un peu de chaleur auprès de ses deux amies: Maureen et Carol. 

 

Au coeur d'un folklorique voisinage, on peut donc faire la connaissance de ses deux femmes. Maureen, femme célibataire positive et débrouillarde dont la fille, Donna, mal maquée à un copain violent ou encore de l'indécise et provocante Samantha (dont le style très "Amy Winehousien" m'a troublée) désespérée par Carol (l'autre amie de Penny) et Ron, ses parents alcooliques et largués. 

 

Et tout ce petit monde se croise, se brouille, se toise mais se soutient aussi dans la pénibilité de la vie. Là où une forme de fatalité semble guetter chacun des personnages, plombés par la grisaille et par des relations humaines complexes.

 

A travers ces tableaux, Mike Leigh ne bichonne personne. Plaçant de lourdes enclumes sur les frêles mollets de ses protagonistes qui ne peuvent nous laisser indifférents face à leur désarroi. Pas le choix que de les regarder se dépatouiller comme ils peuvent.

 

Quant l'argent manque, que l'amour ne fait plus vraiment partie du cadre et que l'alcool et la malbouffe sont les béquilles d'une société anglaise désabusée, Leigh provoque un autre cataclysme dans la vie de Phil et Penny...

 

Et tout est sur le point de s'effondrer pour finalement pousser les membres de leur famille à essayer de repartir sur des bases plus saines et plus solides. 

 

 

C'est bien face aux rudes épreuves de la vie que chacun tend à montrer sa face la plus fragile et la plus humaine. Parfois...Que l'amour peut revenir par touches éparses grâce à un regard, une grimace, un acte manqué. Que cette folie et cette fantaisie qui nous prennent et promettent parfois de casser la routine d'un quotidien morose peuvent alléger un fardeau présent depuis bien trop longtemps.

 

Ce film d'apparence bien sombre est l'histoire d'un amour fragile retrouvé et surtout l'histoire de la vie. Il est triste mais optimiste, décalé et surprenant, énervant et oppressant et restera un très bon souvenir de cinéma british pour moi.

 



29/08/2013
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